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coup du co-lead



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Le coup du "co-lead"

"co-lead piégé"...
Illustrations
[Négocier91], [DessingesDEA], [Swbell], [jbrown4], [SMilgram], [OrientFin], [Geneva], [wdhb]


    Derrière ce témoignage en date de mi-2002 se cache des problématiques complexes d'organisation d'entreprise, de pouvoir. 
    Les différentes illustrations qui suivent s'appuient en grande partie sur le remarquable travail de Catherine Dessinges dans son rapport de DEA :
[DessingesDEA].
    Toutefois, ces illustrations n'en comportent que de brefs extraits, résumés et interprétés par moi dans le contexte bien précis de ce témoignage (le
coup du co-lead), donc sujettes à erreur ou mauvaise interprétation.
    On se reportera utilement à
[DessingesDEA] pour mieux comprendre le concept du pouvoir fondé sur les rapports humains et sociaux dans l'organisation. On gardera à l'esprit que ce qui suit est très "français", comme l'illustre l'article Informaticien et Français ? - Verticalement - Dur!.

    « The disappearance of a sense of responsibility is the most far-reaching consequence of submission to authority. » (Milgram - 1963)

I Concepts du pouvoir (cf.
témoignage sur le coup du co-lead)
II Obéissance et Conformité
III Motivation du personnel

IV Difficile partage du pouvoir
V Fondements du pouvoir

Dans la proposition de Co-lead, 2 notions différentes du pouvoir se font face (interprétations inspirées de [DessingesDEA]) :
    Le premier est un pouvoir lié à l'autorité : le manager dirige et offre au 'mec' du témoignage une place dans la structure de commandement de l'entreprise.
L'organigramme est le symbole le plus caricatural de ce type de pouvoir.
Cette hiérarchisation pyramidale articule un ensemble de positions auxquelles sont attachées un statut et des fonctions. 
Cette structure est étroitement liée au commandement, car elle apparaît comme la division du commandement de l'entreprise, la répartition des fonctions entre les chefs.
    Évidemment, et c'est là l'origine du problème du co-lead, le chef initial de l'équipe, auquel on fait croire qu'un éléments vient rejoindre son équipe, a aussi du pouvoir.
    Ce pouvoir est certes légitimé par l'expression première du pouvoir, une expression formelle (l'organigramme : il est chef de son équipe, et d'après cet organigramme, il est seul chef).
    Mais il a eu le temps de tisser une deuxième forme du pouvoir, informelle, basée sur la "logique des sentiments" des rapports humains. En français, il a eu le temps d'asseoir son leadership, son autorité, son influence qui peut dépasser largement le cadre formel et organisationnel de son équipe. Cette deuxième forme de pouvoir est donc informelle et repose sur un jeu de relation entre les chefs et leurs subordonnés ou supérieurs. La machine à café(!) est un de ces lieux classiques  d'exercice de pouvoir informel!
    Ces deux pouvoirs sont indissociables et indispensables à toute organisation. En particulier, le pouvoir informel est un bon moyen pour permettre aux individus et aux groupes de se soustraire, au moins par moments, aux pressions exercées par les structures formelles.
    De plus, le pouvoir formel n'est jamais que la codification d'un rapport de force entre participant, codification qui a pour fonction de figer ces rapports, de protéger les acteurs contre des remises en causes trop brutales.


I Concepts du pouvoir
II Obéissance et conformité : Milgram (cf. témoignage sur le coup du co-lead)
III Motivation du personnel

IV Difficile partage du pouvoir
V Fondements du pouvoir

The disappearance of a sense of responsibility is the most far-reaching consequence of submission to authority.
(La disparition du sens de la responsabilité est la conséquence ultime de la soumission à l'autorité.)
En 1963, Le professeur Stanley Milgram a conduit une expérience visant à étudier les réaction d'un sujet auquel on demandait de jouer le rôle d'un "professeur" devant évaluer un "élève" au cours d'un exercice de mémorisation. A chaque mauvaise réponse de la part de l'élève, le professeur recevait l'ordre d'un scientifique d'infliger une décharge électrique de plus en plus importante à l'élève.
Or "l'élève" est un comédien, la machine à décharge électrique est bidon.
   Dans ce test "détourné", où celui qui évalue (le "professeur") est en fait le vrai sujet de l'expérience, évalué par le "scientifique", on mesure le degré d'obéissance du sujet.
    Le résultat est saisissant : environ 2/3 des "professeurs" sont allés jusqu'à des voltages très dangereux pour leur patient...
Tous les détails de cette expérience sont relatés par Milgram dans [Swbell]



    [jbrown4] rappelle les 3 facteurs principaux de violence qui ont conduit certains "professeurs" à administrer des chocs électriques sur des "élèves" alors même que ceux-ci avaient cessé de crier et étaient visiblement "morts"!

- l'Autorité ;
- la dynamique de groupe
- la distance (l'étudiant ne se trouve pas dans la même pièce)

 
La “shock machine” de Milgram existe toujours. Elle se trouve dans les archives de l'Histoire de la Psychologie Américaine à l'Université d'Akron.
Pendant plusieurs années depuis 1992, elle a fait parti d'une tournée d'exhibition sur la psychologie organisée par l'APA (American Psychological Association)
L'autorité est représenté par le scientifique dans l'expérience de 1963 et montre que 2/3 des personnes s'y soumettent... le problème, comme le rappelle [SMilgram], c'est que depuis 1963 de multiples expériences ont confirmés ces résultats dans le temps!
La dynamique de groupe s'exprime par la pression des pairs (le professeur est du côté des "scientifiques") et la dilution des responsabilité (le "professeur" ne fait, après tout, qu'exécuter les ordres).
Pour revenir au 'mec' du témoignage sur le co-lead, il se retrouve dans un environnement où l'autorité du chef "légitime" est massivement accepté... 
Le plus simple est donc pour lui de se conformer :
- au pouvoir formel (cf. I Concepts du pouvoir) reconnaissant ainsi le poids de l'organisation tel que décrit dans [DessingesDEA], qui met en avant les caractéristiques structurelles d'une organisation constituant des contraintes qui s'imposent à tous les participants ;
- au pouvoir informel, en s'astreignant à respecter les "règles du jeu", le jeu étant un mécanisme concret grâce auquel les hommes structurent leurs relations de pouvoir et les régularisent. L'organisation est alors vu comme le résultat d'une série de jeu auxquels participent les différents acteurs organisationnels compte tenu des exigences et des règles qui se jouent dans l'organisation. Ces règles  délimitent un éventail de stratégie relationnel.


I Concepts du pouvoir
II Obéissance et Conformité
III Motivations du personnel (cf. témoignage sur le coup du co-lead)
IV Difficile partage du pouvoir
V Fondements du pouvoir

 


[OrientFin] propose les 4 profils ci-contre comme composantes principales d'une personnalité.
Cet article insiste sur la nécessaire complémentarité de ces personnalités au sein d'une équipe, mais rappelle qu'à l'évidence ces profils se retrouvent en chacun de nous à des degrés divers.
Il est intéressant de remarquer que, dans le cas du co-lead, chacun de ces profils se trouve "bafoué" :
- l'explorateur, stimulé par de nouveaux défis dans un environnement changeant, où ses responsabilités peuvent prendre de l'importance... se voit spolié (la place est prise) ;
- le juge, qui apprécie un environnement de travail clair, équitable et intègre se voit proposé un environnement biaisé et piégé ;
- l'artiste, qui attend de l'entreprise qu'elle lui accorde sa confiance, constate que dans ce scénario, la confiance ne règne pas vraiment... ;
- le guerrier enfin attend des mandats de conquêtes et de négociations serrés... avant de se rendre compte qu'il n'y a rien à négocier.


[Geneva] détaille cette étude centrée autours de l'identification du personnel aux objectifs de l'entreprise.
L'étude est issue du « The World Competitiveness Yearbook 2001 », publiée par l'IMD (International Institute for Management Development) de Lausanne, Suisse, en juin 2001.
    Tiens ? La France arrive bonne dernière... Pourquoi ?    





    Une première explication tient dans la culture de centralisation excessive du management à la française.
« On n'est pas sorti de la Monarchie ! » me souffle le 'mec' du co-lead ! Pour lui, on ne délègue pas assez, on ne fait pas assez confiance, ce qui a vite fait de démotiver.
La décentralisation n'a jamais vraiment eu lieu, que ce soit entre Paris et la Province ou entre le manager et ses services...
    Mais on pourra trouver dans [wdhb] pleins d'autres éléments, avec en particulier les pratiques françaises qui vont à l'encontre de l'émergence des talents.
Un des premiers facteurs cités par Pascal BAUDRY, dirigeant de WDHB, c'est le nombre élevé d'agents, censé favoriser cette émergence de nouveaux talents, et que l'on trouve trop rarement en France : 
« La tradition française, au contraire, consiste à monter en interne un projet aussi ambitieux que possible, qui s'inscrit dans une durée plus longue (qui s'exprime en années plutôt qu'en mois), et qui rechigne à faire appel à des compétences extérieures, comme s'il s'agirait-là d'un aveu d'incompétence. Cette approche plus monolithique, qui s'inscrit dans la tradition colbertiste et dans la culture prévisionniste des grandes écoles, nécessite moins d'agents dans l'économie environnante, et est donc moins propice à l'émergence. »
    Enfin, rappelons le comportement managérial français où les plus haut placé sur ce plan s'arrangent toujours pour n'être responsables de rien mais critiques sur tout (« les conseilleurs ne sont pas les payeurs »...) avec, en cas de problème, une stratégie de "punition des innocents" et de "promotion de ceux qui n'ont pas trempé dans le projet" toute trouvée! (cf. conduite de projet et rame)
(Les images ci-dessus sont issues de www.dilbert.com, © 2002 United Feature Syndicate)



I Concepts du pouvoir
II Obéissance et Conformité
III Motivation du personnel

IV Difficile partage du pouvoir : stratégies (cf. témoignage sur le coup du co-lead)
V Fondements du pouvoir
   Si l'on se penche sur les caractéristiques propres du pouvoir, on peut mettre en évidence deux éléments qui freinent naturellement toute velléité de partage du pouvoir :
- le lien entre l'organisation et soi au travers d'un contrôle des ressources ;
- la nature stratégique du "jeu du pouvoir".

    Le pouvoir est représentatif d'une dépendance de l'organisation vers soi.
([DessingesDEA])
Dans le cas qui nous occupe :
- le manager contrôle les ressources (humaines, ici);
- le 'mec' du co-lead contrôle un savoir faire technique et d'un ensemble de compétences, deux notions qui évoquent certes un poste "élevé", comme celui qu'on lui propose, mais également une reconnaissance (dure lorsque l'on est 2 à diriger une équipe) et une certaine autonomie (dure à acquérir ou à négocier face à une situation existante).
    Donc les conditions d'exercice du pouvoir du 'mec', liée à la reconnaissance et l'autonomie, sont difficilement compatibles avec la proposition qui lui est faite.
    De plus, le pouvoir acquis tends à se stabiliser, de par :
- l'engagement et la loyauté antérieure qui influe sur le comportement des membres de l'équipe (ils sont habitués au premier chef).
Par un effet de bord pervers, au lieu d'abandonner un projet mal conçu, on corrige la situation en accordant plus de ressources à ceux qui détiennent le pouvoir ! C'est typiquement ce qui est caricaturé dans la blague des rameurs.
    Résultat : le pouvoir attire le pouvoir.

    Pourtant, la stratégie du 'mec' est bien d'en acquérir. Pourquoi ? Pas simplement pour l'attrait du pouvoir, mais pour mieux participer à l'organisation (ici, développer ses compétences au sein de l'entreprise) : un acteur participe à l'organisation si l'enjeu est pertinent en regard de ses atouts (on retrouve la valorisation de l'aspect management, penser à son CV) et suffisamment important (ici,  être chef!).

    Un acteur est forcément stratégique, donc :
- empirique (il reconnaît les contraintes, les opportunités et les structures formelles, autant de signes que le manager prends bien soin de placer en évidence lors de sa proposition empoisonnée!!!
- humain donc stratégique (le management est plus reconnue que la technique! donc...)
- calculateur et intéressé, donc capable de choix, et le manager compte sur le "choix qui s'impose", "l'offre que l'on ne peut refuser". par conflit, négociation ou intégration.
    Un acteur rationalise sa stratégie par des décisions... mais :
- les informations du décideur sont toujours incomplètes (« ha bon, l'autre co-lead n'était pas au courant ??? »)
- aucun décideur n'optimise ses décisions (à long terme, avec des portes de sorties, etc...).


I Concepts du pouvoir
II Obéissance et Conformité
III Motivation du personnel

IV Difficile partage du pouvoir
V Fondements du pouvoir (cf. témoignage sur le coup du co-lead)

       A l'image des cette carte de jeu, on peut distinguer deux grandes sources de pouvoir :
  • la première est liée à la zone ou source d'incertitude que l'on contrôle, incertitude liée à l'organisation ou liée à l'acteur lui-même (d'où l'image du Joker);
  • la deuxième reprend la notion de dépendance, évoquée précédemment, envers des ressources et comprend 5 formes de pouvoir qui influencent cette dépendance (d'où l'image du heu... du Joker encore!).
  • Ces 2 sources permettent de mieux comprendre "l'enjeu du pouvoir".
   Précisons que ces zones d'incertitude reposent en grande parti sur l'aspect implicite et verticale de la culture française...

    Zone d'incertitude liée à l'organisation
    Celle-ci (l'organisation) est censée faciliter la prise de décision, mais à l'évidence son utilité est pervertie : le co-lead, de par l'organigramme, prend sa décision sur la base d'une place soi-disant à prendre; le manager gère simplement ses ressources. (cf. Informaticien et Français ? Dur!)
    [DessingesDEA] met en lumière le pouvoir fondé sur la prise de contrôle de zone (ou sources) d'incertitudes (financières, techniques, organisationnelles). 
    Ici, le manager est clairement en contrôle de la zone d'incertitude organisationnelle (il désigne "qui est chef") et n'hésite pas à s'en servir non seulement pour contrôler une zone d'incertitude concernant une ressource objective (« qui est chef ? ») mais également pour maîtriser une ressource subjective (son avantage face "aux autres", ici en conservant un "top-profil" à tout prix) 
    Ce qui est vraiment pervers, c'est que l'organisation est censée comporter des "règles du jeu organisationnelle" qui s'imposent à tous et régularisent le déroulement des relations de pouvoir en les rendant un minimum prévisibles. Or cette "proposition empoisonnée" est visiblement faite par quelqu'un habituée à "tordre" ces règles...

    Zone d'incertitude liée à l'acteur
    Ce manager compte également sur une autre zone d'incertitude, source de pouvoir : le comportement des acteur de son organisation.
    Il sait que ce comportement est le plus souvent "passif et adaptif", pour rester dans la norme.
    La réaction du co-lead de déclencher son siège éjectable est dès lors difficile à prendre, car on s'exclue de la norme.
    En plus, un co-lead piège (donc qui ne "lead" - ou dirige - rien du tout) se retrouve enfermé dans un ensemble de règles structurelles de son entreprise (une équipe, *un* chef, ...) qui peut aisément le décharger de ses capacités d'analyse (à savoir "je me suis fait avoir!") et peut l'amener à l'état de dé-responsabilisation (cf. Milgram) et de démotivation évoqué ci-dessus.

    Une deuxième source de pouvoir réside, comme indiqué dans le point précédent, dans la dépendance par rapport à des ressources (la dépendance du 'mec' par rapport aux ressources - attribution des postes - du manager qui constituent le pouvoir du manager sur le mec)
    [DessingesDEA] cite 5 sources de pouvoir dont use - et abuse - notre manager :
- le pouvoir légitime : proposer un poste inscrit dans l'organisation (soit disant prévu dans l'organigramme) ;
- le pouvoir de renforcement : "récompense" (fausse et empoisonnée) ;
- le pouvoir coercitif : « si tu rues dans les brancards, mise au placard ! »... Cela illustre l'aspect "rapport de force" contenue dans toute relation de pouvoir (bien que celle-ci ne se limite pas au seul rapport de force) ;
- le pouvoir d'information : tout le monde en a, mais ce manager peut "générer de l'info" pour valoriser ou casser un collaborateur auprès d'autres managers, et ainsi le garder plus facilement sous contrôle. C'est un nouveau visage de l'incertitude, qui repose sur l'opacité du lien information-pouvoir... opacité qui évolue dans le temps ;
- le pouvoir de référence : lié au charisme, le manager joue les pouvoirs des 2 co-lead l'un contre l'autre, en sachant déjà qui va gagner...

    L'enjeu est alors est de gagner du pouvoir en maîtrisant :
- les ressources ;
- les moyens de promotions (descendants, via l'attribution des postes ou ascendants, en influençant les autres managers et supérieur pour mieux conserver son top-profils)
- un comportement suffisamment imprévisible qui lui permet de "sentir d'où vient le vent" et d'adopter une politique adroite si nécessaire... pour arriver au manager ultime évoqué au point III  - Motivation - (effet de bord poussé à l'extrême, "responsable de rien", "critique de tout").
    On retrouve là 3 l'exploitation de 3 sources de pouvoir, telles que présentées dans [Négocier91], à savoir :
- le pouvoir institutionnel : qui rejoint celui de la "zone d'incertitude liée à l'organisation" ;
- le pouvoir individuel : qui rejoint celui de la "zone d'incertitude liée à l'acteur" ;
- le pouvoir circonstanciel : qui rejoint celui de la dépendance que l'on peut avoir envers des ressources.


               
 
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