Quel
cadre êtes-vous ?
Si vous relisez la
colonne concernant les différents cadres tels
qu'ils sont présentés dans le l'article
11 de la Loi (Chapitre 3), vous constaterez
que vos accords peuvent vous réserver 3 sorts :
- pas de réduction si vous êtes cadre
dirigeant,
- horaire collectif (avec un forfait en heures
exprimé de façon hebdomadaire,
mensuelle ou annuelle),
- forfait en jours (217
jours) sans références horaires.
Êtes-vous dirigeant ?
Bon... en principe,
non. Petit rappel, pour être dirigeant, il
faudrait :
- une grande indépendance dans l'organisation de
son emploi du temps,
- une habilitation à prendre des décisions de
façon autonome et (surtout!)
- une rémunération se situant dans les niveaux
les plus élevés de l'entreprise ou de
l'établissement.
Donc, relisez votre fiche de paie et passez au
paragraphe suivant.
Et l'horaire collectif,
alors ?
L'horaire collectif,
cela peut prendre la forme d'un travail un
certain nombre prédéterminé d'heures (par
exemple, par semaine), couplé à un nombre de
jours de RTT. Tout cela est expliqué dans 35
Heures - et alors ?.
Et alors ? Y
avez-vous droit ? Relisez le passage sur les 3
types de cadres. Vous y noterez une phrase en italique bleu
qui dénote un ajout à la Loi sur les 35 heures
obtenu en deuxième lecture.
Les articles
L212-5-1 à L212-5-4 prévoient
bien l'application des dispositions communes de
tous les salariés aux cadres dont « la durée du temps
de travail peut être prédéterminé ».
La Loi parle donc bien de
"durée" et non d'horaire. Posez-vous
donc la question : « ma durée de
temps de travail, soit le temps que j'y consacre,
peut-elle être déterminée ? » (même
si l'horaire, soit la répartition de ce temps de
travail dans la journée, n'est pas fixe ou
prévisible)
Si oui, en théorie, vous devriez
bénéficier des "dispositions communes de
tous les salariés".
En pratique ?... Si vous travaillez
dans un service de l'entreprise elle-même, vous
avez une (toute) petite chance que cela soit le
cas... mais c'est rare. Si
vous travaillez chez un client (cas de la régie),
c'est mal barré... vous
allez avoir droit à un forfait. Mais lequel ?
Et le forfait horaire
annuel, alors ?
De tous les
forfaits, il reste le plus avantageux. Le forfait
annuel en heures (article 11 de la Loi,
L212-15-3-II et L212-15-4-I du Code du Travail) a déjà l'immense avantage
d'être écrit (et donc ratifié par un
accord, au contraires des forfaits en heures
hebdomadaires ou mensuels...).
De plus :
- la durée annuelle est limitée à 1730 heures
(1600 heures que le texte fixe comme équivalent
à 35 heures, plus le contingent maximal d'heures
supplémentaires annuel de 130 heures) ;
- un décompte
horaire (badgeage ou
déclaration) doit être mis en place et
tenu à la disposition de l'Inspection du Travail
;
- les maxima journaliers et hebdomadaires peuvent
déroger aux valeurs légales, mais ce n'est pas
une obligation, et en tout état de cause des
maxima doivent être explicités dans l'accord ou
la convention ;
- les heures supplémentaires incluses dans le
forfait doivent être incluses dans la
rémunération. Cette disposition permet de
revendiquer une augmentation de salaire pour tous
les cadres précédemment à l'horaire collectif
qui se verraient soumis au régime du forfait en
heures.
Bref, avec ou sans ces contrôles,
un "cadre horaire" est plus rassurant.
Pourtant, ces confortables limites... ne sont pas
pour vous. |
Le
forfait en jours sans références horaires
Pourquoi,
dans la très grande majorité des cas,
allez-vous y avoir droit ?
Parce que
l'on considère que vous faites parti de la troisième
catégorie de cadres, celle
dont la
durée du temps de travail ne peut être
prédéterminée du fait :
- de la nature de leur fonction,
- des responsabilités qu'ils exercent,
- et le degré d'autonomie dont ils bénéficient
dans l'organisation de leur emploi du temps.
En
théorie, le dernier critère devrait vous
exclure (en particulier ceux en régie)
de cette catégorie. En effet, « autonomie dans l'organisation
de l'emploi du temps » (évoqué dans
l'article sur les Les
35 Heures et les cadres) ne
signifie pas « autonomie dans la mission ». L'autonomie dans l'organisation de son
emploi du temps renvoie aux latitudes dans les
organisations respectives de son temps de travail
et de son temps libre.
Le cadre responsable d'une équipe, qui doit
être en général présent pour la diriger, n'a
pas d'emploi du temps autonome, puisque celui-ci
est nécessairement lié aux horaires de son
équipe.
L'ingénieur, ou le cadre expert dont l'emploi du
temps dépend de celui de ses collègues de son
services, ou de son groupe de projet, n'a pas non
plus d'emploi du temps autonome. Il en est de
même pour le cadre commercial dont l'emploi du
temps est nécessairement lié à celui de ses
clients qu'il prospecte...
Il faut également souligner que le fait pour un
cadre d'avoir à effectuer des déplacements
fréquents ne constitue en rien un facteur
d'autonomie dans son emploi du temps. Au
contraire, de plus fortes contraintes pèsent sur
celui-ci.
Là encore,
posez-vous la question : « suis-je
réellement autonome dans l'organisation de mon
emploi du temps ? »
Détendez-vous
: la direction de votre entreprise a trouvé la
réponse pour vous : c'est oui.
Le
forfait en jours, et alors ?
Ben
oui... en quoi, comme l'introduction de cet
article le suggère, le forfait en jours sans
références horaires ne serait-il pas efficace
pour "réduire votre temps de travail"
?
Tout
simplement parce que les garanties
prévues par la Loi sont trop
souvent inexistantes. Quelles garanties ? Celles
concernant :
- le suivi de l'amplitude des journées
d'activité et de la charge de travail qui en
résulte,
- la conservation des documents permettant de
comptabiliser le nombre de jours travaillés.
En clair, en
l'absence de tout contrôle de votre temps de
travail (cf. Accords
types), on peut
toujours prétendre que votre charge de travail
(dont l'amplitude n'est pas contrôlée, elle
aussi) reste dans des limites raisonnables...
alors qu'en réalité vous continuez à
travailler autant "qu'avant" les 35
heures...
Conclusion
Relisez
votre accord d'entreprise... Si vous avez une
douzaine de jours de RTT sans qu'il ne soit fait
allusion à des références horaires, à un
mécanisme de décompte du temps de travail ou de
mesure de "l'amplitude des journées
d'activités"... vous n'êtes pas
vraiment concerné par les 35 heures et la conclusion de l'article 35
Heures - et alors ? s'applique.
En
plus, vos jours de RTT ne sont pas
nécessairement des congés
supplémentaires, mais, et c'est très
positif, sont
potentiellement des jours de formations,
celles-ci ayant enfin un statut officiel....
Bref,
certains s'accommoderont de ce type d'accord sans
problèmes... en l'oubliant! D'autres
éprouveront une légitime douleur à l'arrière
train en allant se rasseoir devant leur station
de travail.
A vous de vous faire votre opinion!
P.S. : je sais, l'allusion à "l'arrière
train" est limite vulgaire, mais elle me
fait bien rire... enfin, "rire jaune",
évidemment. |