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CDDF : clauses type |
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dédit-formation |
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Origine : la formation
professionnelle
Avant d'abord la clause
de dédit-formation, rappelons en un mot l'origine de cette
clause : la formation.
Cette noble tâche (la
formation professionnelle permanente) est
présentée dans le Livre 9 du Code du travail comme une «
obligation nationale ».
Art 900-1 : La formation
professionnelle continue a pour objet de « permettre
l'adaptation des travailleurs au changement des techniques et
des conditions de travail, de favoriser leur promotion sociale
par l'accès aux différents niveaux de la culture et de la
qualification professionnelle et leur contribution au développement
culturel, économique et social ».
Il est précisé que l'État, les
collectivités locales, les établissements publics, les établissements
d'enseignement publics et privés, les associations, les
organisations professionnelles, syndicales et familiales,
ainsi que les entreprises, concourent à l'assurer.
L'article 951-2 précise aussi que les dépenses
engagées à ce titre par l'entreprise peuvent couvrir les
frais de formation et la rémunération des stagiaires. Les dépenses
d'équipement en matériel sont admises dans la limite du
prorata de l'annuité d'amortissement correspondant à
l'utilisation de ce matériel à des fins de formation. Les
dépenses sont retenues pour leur montant réel, déduction
faite des concours apportés par une personne morale de
droit public au titre de la formation professionnelle.
Notons enfin ce fascinant détail, issu du
[MemoSocial2001]
: il concerne le plan de formation.
Ce dernier représente l'ensemble des
actions de formations (formations proprement dites ou bilan de
compétence) que l'employeur décide de faire suivre à ses
salariés. Il s'agit d'actions retenues en fonction des
objectifs de développement de l'entreprise et de ses
évolutions techniques.
...
De fait, aucun
texte (ni loi ni convention) ne définit expressément ce
qu'est un plan de formation. Le Code du travail
(art. D. 932-1) y fait tout juste allusion.
Principe
La validité
de la clause de dédit-formation a
été reconnue par
la loi du 31 décembre 1991 (art
L 933-2, 7° du code du travail).
(article de Loi déjà évoqué dans l'article sur
les Formations).
L'article 933-2, dans le cadre des droits collectifs des
salariés, précise que :
« Les organisations qui sont liées par une convention de
branche [...] se réunissent au moins tous les 5 ans pour
négocier sur les priorités, les objectifs et les moyens de
la formation professionnelle des salariés. »
La négociation porte notamment sur 11 points, dont fameux
alinéa 7, à savoir la négociation sur :
« Les conditions d'application,
dans les entreprises qui consacrent à la formation de leurs
salariés un montant au moins égal à l'obligation minimale
légale ou celle fixée par la convention ou accord collectif
de branche relative à la participation des employeurs au
financement de la formation professionnelle continue,
d'éventuelles clauses financières convenues entre
l'employeur et le salarié avant l'engagement de certaines
actions de formation et applicables en cas de démission, les
versements effectués au titre de ces clauses étant affectés
par l'entreprise au financement d'actions dans le cadre du
plan de formation. »
Principe... en français
Bon... après le jargon juridique
établissant, au détour d'un alinéa, l'existence d'une telle
clause, voici son principe exprimé en bon français :
« Les clauses de dédit-formation sont
celles qui engagent le salarié à demeurer au service de
l'entreprise à l'issue de la formation, sous peine d'en
rembourser le coût. »
En Droit civil, le dédit est la possibilité
qu'a un contractant de ne pas exécuter son obligation.
Validité
Ces clauses sont valables lorsque :
- les dépenses exposées par
l'entreprise l'ont été au-delà de son obligation légale de
financement de la formation professionnelle (Cass.
soc., 9 févr. 1994, n° 91-44.644)
Par ailleurs, la formation ne doit pas
avoir été remboursée par un organisme paritaire ou par l'État,
auquel cas il n'y a pas de surcoût pour l'entreprise. (CA -
Cour d'Appel - Paris, 3 mai 1984) ;
- la durée de l'engagement du salarié
doit être proportionnée à la formation suivie et notamment
à son coût ou à sa durée (Cass. soc, 12 mars 1987,
n° 84-41.056) ;
- la clause ne doit pas avoir pour
objet de priver le salarié de démissionner. (Soc.
17 juill. 1991 : Bull. civ. V, n°373)
- la clause s'applique normalement en
cas de démission ou de rupture imputable au salarié
(CA Nancy, 25 avr. 1986).
Elle ne peut jouer en cas de rupture par
l'employeur, sauf si le licenciement est prononcé pour faute
grave du salarié (CA Nancy, 25 avr. 1983).
Le licenciement pour motif économique n'ouvre pas droit au
remboursement des frais de formation par le salarié.
De même, lorsque le salarié
démissionne suite au refus de l'employeur de lui fournir du
travail, la clause de dédit-formation ne s'applique pas.
(CA Montpellier, 28 févr. 1991). Idem s'il démissionne parce
que son employeur ne lui payait plus ses salaires.
On notera que l'employeur reste libre de
licencier le salarié pendant la durée d'application de la
clause (Cass. soc., 5 janv. 1999, n° 96-42.931).
La loi interdit les clauses de dédit-formation dans les cas
des contrats d'insertion en alternance (qualification, adaptation et
orientation) (Code Trav., art. L. 981-10).
Par ailleurs, l'art. L. 932-1 ajoute que l'employeur ne peut prévoir,
lorsque la formation a été réalisée en partie hors du temps de
travail, une
clause de remboursement, par le salarié démissionnaire, des frais
engagés.
La loi réserve toutefois le cas des salariés dont la rémunération atteint un
certain niveau : lorsque cette rémunération est supérieure à 3 fois le SMIC,
une clause de dédit-formation peut être prévue par l'employeur.
Remboursement
Lorsque les conditions de
validités sont respectées, le salarié peut donc se voir
exiger le remboursement de la formation suivie.
Toutefois, seul le coût réel de la
formation peut lui être demandé. Ce coût prend en compte le
coût d'inscription et les frais annexes.
Concernant les salaires, la question n'est
pas tranchée par la jurisprudence. Certaines cours d'appel
considèrent que les salaires, voire les salaires du
remplaçant le cas échéant, sont dus!
D'autres estiment
que le salaire est dû indépendamment du suivi de la
formation et qu'il ne constitue donc pas une dépense
remboursable.
En pratique (milieu informatique), la
question du remboursement du salaire ne se pose pratiquement
jamais.
La clause doit prévoir les modalités de
ce remboursement. Ces modalité peuvent ou non inclure
un remboursement au prorata temporis (cf. clauses types).
L'employeur
peut se rembourser du dédit formation en opérant une
compensation entre le salaire du dernier mois de travail et le
montant des dépenses de formation sur la base de la fraction
saisissable.
L'employeur ne peut retenir la
quasi-totalité du dernier salaire ( Cass.
soc., 21-3-2000, Etcheverry c/ Maafa ) |
Problèmes
posés par cette clause
On trouve d'abord des problèmes d'ordres
purement pratique :
- comment savoir les coûts exacts d'une formation ?
- comment savoir que la somme réclamée ne fut
pas couverte (ni par une subvention d'une personne morale, ni déduite
des bénéfices (BIC) au titre du compte de résultats) ???
- comment déterminer que "les
dépenses exposées par l'entreprise l'ont été au-delà de
son obligation légale de financement" ???
De plus, gravite autours de cette clause
des pratiques beaucoup plus suspectes, relevées par
[JurisPN]
:
- Les contrats de qualification,
où le candidat paie sa formation et reste prêt à occuper un
emploi. Sans formation, sa candidature n'est pas retenue!
- la période d'adaptation en entreprise,
où le candidat est rémunéré à un salaire bien inférieur
à celui du marché, et bénéficie d'une formation.
Précisons d'emblée que le premier type
est plus que rare dans le milieu informatique( alors qu'il est
courant dans l'aéronautique, domaine professionnel traité
par
[JurisPN]).
Le deuxième, en revanche, est ou a été
d'actualité dans bien des SSII, obligées de former des
ingénieurs en "double compétence" (faute de
personnel qualifié sur le marché du travail, comme décrit
dans l'article "2K22K1,
cherche informaticien désespérément"... même si
cette situation est en
train d'évoluer, voire de s'inverser, si l'on en croit ce Profile
Warning).
Cette deuxième pratique fait couramment l'objet d'une clause
de dédit-formation. Mais si l'employeur embauche systématiquement
des employés dépourvus de toute formation, et leur demande
ensuite de suivre une formation pour laquelle une clause de dédit
formation est prévue... le juge pourra aussi décider de ne
pas faire appliquer la-dite clause!
Forme
On ne peut donner de modèle absolu de
cette clause. Elle concerne le remboursement d'une somme fixe
ou dégressive en cas de départ dans une période donnée
(exemples de telles périodes : « deux ans après l'embauche
», ou « moins d'un an après la dernière formation »).
De telles clauses sont-elles légales. Oui
à deux conditions :
1/ Elles doivent respecter les conditions de validités
exposées ci-contre (notamment en évitant un remboursement
excessif qui priverait le salarié du droit de démissionner,
ou en indiquant une période de dédit excessive).
2/ Elles doivent être conformes aux conditions essentielles
de tout contrat, à savoir respecter :
- Le consentement de la partie qui s'oblige ;
- Sa capacité de contracter;
- Un objet certain qui forme la matière de l'engagement ;
- Une cause licite dans l'obligation.
(article 1108 du Code civil, dans le cadre de la définition
de notion de "contrat", ce qui, d'après l'article
1101 du Code civil, est une convention par laquelle une ou
plusieurs personnes s'engagent envers une ou plusieurs
personnes, à faire, à donner ou ne pas faire quelque chose).
La clause de dédit
formation ne se présume pas. Elle doit être écrite ;
pas d'écrit pas d'obligation de dédit-formation (Bull. inf.
C. Cass. 15 Décembre 1996, N° 1345) ;
On rappellera qu'une clause de
dédit-formation peut prendre 2 formes
:
1/ forme d'un contrat extérieur
au contrat de travail. Elle est alors régie
par l'article 1134 du Code civil qui dispose que « les
conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux
qui les ont faites » (la loi des parties) ; l'absence
de légalité dans la conclusion de la convention pouvant être
une cause de nullité. Aussi, le Code civil précise que les
conventions doivent être exécutées de bonne foi à savoir
avec loyauté dans la conclusion et l'exécution d'acte
juridique). Le contrat est un acte
juridique, plus précisément un "acte
conventionnel" ;
2/ forme
d'une clause incluse dans
le contrat de travail. Elle est alors régie par l'article L.
122-5(4) du
Code du travail pour ce qui est des cas de rupture de la
relation de travail à l'initiative du salarié.
L122-5 stipule l'existence du délai-congé ou préavis.
Cette section (4) relative aux jurisprudences traite de le
clause de dédit formation et l'on retrouve le paragraphe
"Validité" ci-contre colonne de gauche.
Il convient aussi de prendre en compte les dispositions de l'art. 122-13 du même Code qui stipule que
« la résiliation d'un contrat de travail à durée indéterminée, à
l'initiative du salarié, ouvre droit, si elle est abusive,
à dommages-intérêts ». En cas de litige sur le caractère
abusif ou non de cette rupture, le Juge saisi se prononcera
conformément aux dispositions de l'Art. 122-14.3 du Code du
travail. Cela a par ailleurs une conséquence dont vous, jeune
(moins jeune) ingénieur informaticien, avez de gérer
plusieurs propositions de contrat.
cf. aussi cddf
: clauses types.
Précisions
En parcourant les différentes
sources de documentations sur le sujet, on peut glaner les
"points de repère" suivants :
Légitimité
Si, malgré ce qui précède, d'aucun doute
encore de la légitimité d'une telle démarche, rappelons que
les clauses de "dédit-formation" ont un triple
aspect :
- social (promotion, amélioration des conditions de travail)
;
- économique (création de poste, augmentation d'activité)
et
- financier (dépenses et coûts).
Ces dispositions, nées d'un souci bien légitime,
sont principalement destinées à protéger l'entreprise qui
investit, dans la formation de son personnel, d'un départ prématuré
voire précipité du salarié souvent vers la concurrence.
Clause pénale
La Chambre sociale de la Cour de cassation
par son arrêt du 23 janvier 1985, a estimé que la clause de
dédit-formation par le fait même qu'elle comportait une pénalité
financière, devrait être regardée comme une clause pénale
et donc, susceptible de révision par le
juge.
En effet, il n'est pas inutile de rappeler
à ce niveau les pouvoirs du Juge sur
les contrats, pouvoirs qu'il tient de la loi dont
notamment, pour ce qui est des clauses pénales, le pouvoir
de révision (article 1152 alinéa 2 du Code civil).
Cette faculté fut donnée au Juge pour éviter qu'une partie
forte ne puisse imposer dans un contrat sa volonté à une
partie faible
Durée
excessive
Comme précisée précédemment, la durée
d'une telle clause ne doit pas être excessive.
[drh-fr]
nous indique toutefois que cette durée est :
- au minimum de 6 mois ;
- au maximum de 4 à 5 ans(!)
Elle est à fixer en fonction de la durée et du
coût du stage, ainsi que des fonctions exercées par le
salarié.
Donc elle ne peut guère dépasser un an
pour un technicien ou agent de maîtrise après un stage de
quatre ou cinq mois ; elle peut être portée à quatre ou
cinq ans après un stage de 18 mois "offert" à un
cadre ou à un technicien supérieur.
Or, ces
derniers temps, des stages
d'adaptation de 2 mois proposés dès l'embauche (en SSII par
exemple) des jeunes ingénieurs , c'était possible... et cela
peut entraîner une clause de dédit-formation allant jusqu'à
2 ans facilement.
Montant à
rembourser
Ce montant, dont les modalités de
renseignement sont présentées ci-contre colonne de gauche,
est, en cas de conflit, "stipulatif" (et non
mathématique).
Cela signifie que, quelque soit la formule
avancée par l'employeur, ce ne sera jamais que l'expression
de la volonté énoncée dans une convention. Or si les
parties stipulent, seul le législateur disposent. |
CDDF
& CNC
(Traduction : « où il est
question du lien entre Clause De Dédit Formation & Clause
de Non-Concurrence »)
Un lecteur attire mon attention sur une
phrase d'une gazette de
[Tripalium]
dans laquelle on peut lire : « La clause de dédit-formation ne doit pas être associée à une clause de non concurrence ayant pour effet d’empêcher le salarié
d’exercer librement son métier »
D'où la question : « une clause de dédit formation peut-elle
être ajoutée par un avenant à un contrat de travail comportant une clause de non concurrence ?
»
A mon sens (et sans être un expert
juridique, cf. Avertissement
!), la réponse est à l'évidence oui. Cette phrase ne *signifie pas* que les
deux clauses (de dédit-formation et de non-concurrence) ne peuvent co-exister sur un même contrat de
travail.
Simplement, il est vrai que la clause de non concurrence doit être rédigée de façon à ne pas empêcher le salarié d'exercer une
activité conforme à son expérience et à sa formation.
(cf. CNC
FAQ, haut de la 2ème colonne).
Or même si une clause de non-concurrence est "bien" rédigée, elle peut quand même empêcher le salarié d'exercer une activité
conforme à son expérience et à sa formation si cette formation a été
acquise au sein de l'entreprise *sous contrôle* d'une clause de dédit formation importante...
Donc si la formation concernée par la clause de dédit-formation est la même (et la seule!) formation que celle concernée par la
clause de non-concurrence, l'effet cumulé des deux clauses empêchera sans doute le
salarié de démissionner, ce qui rend ces clauses nulles dans leur principe. |
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