Introduction... crise et
doute
Comme rappelé dans l'histoire
des prestataires, 1985-1996, 1991 a marqué le début
d'une crise de 5 ans. 1997-2000
a vu le marché de l'informatique se reprendre avant de culminer, boosté par Internet, en 2000-2001...
puis s'essouffler sérieusement en 2001-2002
et de connaître une période de doute en 2002.
Ce qui suit replace tout cela dans un scénario
dont les acteurs interviennent dans un ordre bien précis.
Cela doit vous permettre, si vous êtes en SSII, de mieux
situer l'action de votre boite dans le cadre d'une histoire
cyclique sur plus de 10 ans!
Crise => Audit + Stratégie
En période de crise, au début des années
1990, les entreprises veulent se recentrer sur leur
métier (phénomène déjà illustré dans l'article Nature
et objet d'une organisation), et
"rationaliser leurs processus" (en clair,
virer l'inutile et le superflu, et gagner du fric en
diminuant les coûts).
Pour cela, 2 solutions sont mises en
place :
1/ de grands cabinets d'audit se forment ou montent en
puissance et inspectent les process client pour en
rationaliser le fonctionnement.
2/ des cabinets de stratégies scrutent à
360°, secteurs d'activité par secteur
d'activité, |
Audit + Stratégie => vendent une
solution au client
Début 1990, les progrès des
réseaux font que les entreprises se voient confrontées
à un flux de données de plus en plus dur à gérer. Et
en plus, ces mêmes entreprises en rachètent d'autres
et doivent gérer des systèmes d'informations
hétérogènes. Cela est illustré dans l'étape 5 de Pourquoi
l'Architecture ?.
La solution, détectée par la cellule
stratégie, consiste à mettre en place des systèmes
d'exploitations de données à des fin de planification / prévision /etc...
On y trouve des ERP (Enterprise Ressource Planning,
gestion des ressources de l'entreprise), des SRM (Supplier
Relationship Management, gestion de la relation fournisseur),
des SCM (Supply Chain Management), ...
La stratégie explique cela à ceux
qui sont en contact direct avec le client : les
auditeurs. Ces derniers font de ces solutions leur
option "ROI" (et non
"reine"). En effet, ce qu'ils vendent au
client, c'est un retour sur investissement
très important (Return Of Investment, d'où
ROI). |
Solution au client
=> adaptation, implémentation et formation
Après avoir vendu la solution
(ici des logiciels permettant de mieux gérer les
données du client), il s'agit d'accompagner ce client
dans la mise en œuvre de cette solution.
C'est à ce moment qu'entre en jeu
les sociétés
de conseil, et elles se déclinent en trois
catégories :
conseil fonctionnel (et/ou organisationnel) :
afin d'adapter les process clients au produit, de
façon à ce que celui-ci puisse exploiter les données
des-dits process de façon optimale;
conseil technique : afin d'implémenter la
solution (et dans le cas des ERP, SRM et autres, c'est
facile : en un à deux ans de formation, n'importe qui
peut être performant : ce détail aura son
importance plus tard au moment de la crise, cf. plus
bas...);
conseil en changement : afin de former le
client aux nouveaux produits censés lui assurer un ROI
conséquent.
On retrouve au passage l'importance de la base de
connaissance intégrée concernant
les sociétés de Conseil. |
Adaptation,
implémentation et formation => solution mature
Tout a poussé pour que cette
solution (exploitation des données) devienne mature :
les réseaux ont explosé (Internet en plus), les
micro-ordinateurs ont vu leurs puissances décuplées,
les sociétés de conseils, et en leur sein, les
sociétés techniques - de service - ont rempli leur
mission. Beaucoup de SSII sont
issus de ces structures de conseils et de cette période.
Du coup... ben la stratégie, on n'en
entend plus vraiment parler! Pour survivre, les
consultants de ces cabinets de stratégie
s'intéressent à d'autres secteurs d'activités, ou
recyclent d'autres technologies en exploitant leur
carnet d'adresse.
Cela a amené certains cabinets d'audit ou de conseil à
se séparer de leur branche "stratégie", se
privant d'une "veille client" (et veille
technologique) précieuse qui est à la base même de ce
cycle (et donc de sa relance lorsque le cycle actuel
s'essouffle...)
D'où un déclin de la
stratégie. |
Adaptation,
implémentation et formation => client avec ROI
Tous les clients n'ont pas toujours
eu le ROI souhaité. Ces produits sont en effet complexe
à maîtriser et surtout à exploiter efficacement...
mais la conjoncture s'en est mêlée, et le phénomène Internet
a permis "de toutes façons" de faire du
business!...
Du coup, les cabinets d'audits n'ont
plus trop la côte : on n'aime pas leur voir mettre leur
nez dans les affaires d'un client qui veut à tout prix
afficher une image de prospérité en accord avec
l'épopée économique euphorique du moment... et cela a
finit par déraper : on en arrivât à payer des cabinets
d'audit pour publier de fausses analyses sur la santé
des sociétés!
Dans ce contexte, les cabinets de conseils
s'émancipent des cabinets d'audits (dans certain cas,
le conseil n'étaient parfois au début qu'une division
des cabinets d'audits, division créée pour répondre
aux besoins en "adaptation, implémentation et
formation" générés par la vente de la solution
au client).
Quant à l'audit, quand tout va
bien... tout le monde ne veut entendre que cela :
« Tout va bien! ».
D'où un déclin de
l'audit. |
Adaptation,
implémentation et formation => technologie
maîtrisée
Certes, la technologie concernant les
ERP, SRM, SCM, etc... ne s'est pas maîtrisée en un
jour... mais au bout de 10 ans, les sociétés de
conseil où les SSII qui ne misaient que sur ce
secteur commencent à voir des clients qui récupèrent
de plus en plus la maîtrise de ces logiciels.
Les SSII n'ont pas décliné bien au
contraire, car cette gestion des données alliée à
l'explosion des réseaux via Internet a engendré d'autres besoins techniques de connectivité.
En clair, manipuler des données de provenances diverses
génère une plomberie pas possible dont le bon
fonctionnement se voit assuré par des EAI,
J2EE et autres .Net (et j'en passe) !
Et pourtant, ... en ce moment c'est la crise!
Sociétés de conseil et SSII se font racheter par de
grands constructeurs (style IBM) ou de grands éditeurs
de logiciels ou de système d'exploitation...
D'où déclin du conseil en
général... |
La crise : trop
de technique
Et l'on touche là du doigt
le cœur de la crise : la technologie pure ne peut
suffire à faire vivre les acteurs (audit, conseil,
SSII, ...). Celui qui reste au centre du cycle
présenté ci-dessus, c'est le client. Et le client, il
se sent un peu paumé en ce moment...
Le phénomène Internet en est une
illustration flagrante : technologiquement,
il est possible de connecter tout le monde avec tout le
monde... et de fait, "tout le monde" s'est
rué pour se faire pignon sur net.
Mais cette technologie-là n'a pas vraiment été
détectée par la stratégie, et elle n'a pas été
vendu par l'audit, dans le cadre des process du client.
Et alors ?
Ben... 2 petites questions ont été oubliées dans le
feu de l'action, dans cette "ruée vers le
net" :
- que va-t-on y bien y faire, sur le net ???
souvenez-vous, à l'époque, des start-up
qui levaient des fonds énormes... sans une idée très
claire de leur projet !?
- est-ce que cela rapporte ??? Et là, on voit bien que
cette technologie n'a pas été vendu par un cabinet
d'audit, soucieux de mettre en avant un ROI alléchant.
Tout le monde a regardé la bourse, s'est dit que :
"oui, ma foi ça rapporte un max'" et se
réveille aujourd'hui avec une sérieuse gueule de
bois...
Il y a donc eu un mini-cycle artificiel, une
"vague" qui est montée plus haut et plus vite
que la vague de fond. Cette vague de fond, rappelons-le,
est basée non sur Internet mais sur
les ERP, SRM et SCM, et elle a duré entre
10 et 15 ans. Celle concernant Internet n'a duré que 4
ans (1998-2001). Elle va se poursuivre, mais à un
rythme plus raisonnable et surtout après quelques sérieuses
études de rentabilité...
Une première raison se trouve dans la durée de
formation d'un intervenant sur ces techniques : pour
bien maîtriser tout ce qui touche à Internet et les
architectures distribuées, en passant par les serveurs
d'applications, les paradigmes
objet
et composants... il
faut des années! Et non 2 ans dans le cadre de la mise
en œuvre des ERP & C°, comme mentionné dans le
paragraphe "solution
au client".
Mais une raison plus fondamentale est que les besoins du
client n'ont pas été à l'origine de cet technologie. |
La relance :
replacer le client au centre du jeu
Et c'est un évidence,
lorsque l'on a compris à quoi sert une organisation
(c.à.d. ici une entreprise). Le paragraphe ci-dessus
("crise")
a bien montré que la techno a oublié le client.
Beaucoup de SSII font de la technique pour la technique
et ont du mal à la vendre au client.
Ce n'est pas un hasard si la
technique du moment (2002-2003) se nomme "Web services".
"services" est bien entendu le mot-clé de cette
expression : au delà du web ou de la connectivité, il
s'agit avant de permettre au client d'accéder ou de
fournir un service.
Si le cycle décrit ci-dessus veut bien se
remettre en route, si la stratégie veut bien identifier
les bons services à fournir en priorité, si l'audit
estime correctement les bons investissements à faire et
les ROI attendus, le client n'aura aucun mal à
réinvestir massivement dans l'adaptation,
l'implémentation et la formation concernant les
services vendus par l'audit. Le conseil, et avec lui
toutes les SSII en tout genre auront de nouveau le vent
en poupe.
Pour l'instant, on attend de voir ce que
sont vraiment les web services... et surtout ce qu'ils
peuvent vraiment faire gagner au client. |
Conclusion : Cycle universel ?
Nous voilà arrivé au terme de ce
"rollercoster" (montagne russe).
Si l'on regarde vers l'avenir, on ne
peut qu'espérer un redémarrage basé sur les vrais besoins
des clients...
Toutefois la donne a changé :
- autant les ERP,
SCM et SRM ont été faits par des gens issus du client et
basés sur les process et besoins de leur ancien employeur,
- autant Internet et les web services sont le fruit de potentiels
techniques forts sans être guidés par les analyses de
département stratégie ni être vendu par des cabinets
d'audits...
Aujourd'hui, les acteurs majeurs ne sont
plus tant les clients que les grands constructeurs ou
éditeurs...
Le nouveau cycle devra donc composer avec
une réalité différente : avant (1990), on se tournait vers
le client pour définir des technologies ad-hoc (ERP &
C°). Aujourd'hui, il faut réussir à faire en sorte que le
client se tourne vers les technologies disponibles pour
définir des besoins ad-hoc (comme des web services qui ont du
sens et qui lui rapportent effectivement quelque chose de plus
concret qu'un cours en bourse pour le moins aléatoire...).
Si l'on regarde vers le passé, on se
demande si un tel cycle (à savoir un cycle où le moteur
n'est pas le client comme en 1990, mais la technologie comme
aujourd'hui - 2003) n'a pas déjà eu lieu.
En effet, fin 1970, début 1980, la technologie qui a poussé
les clients vers une évolution majeure était... les réseaux
(déjà! et l'on ne parlait pas d'Internet). Ce sont ces
réseaux d'entreprises et leurs protocoles propriétaires qui
ont permis, par exemple, aux compagnies d'aviation aérienne
de proposer des réservations centralisées de billet : plus
besoin de téléphoner à plusieurs compagnie dans le cadre
d'un vol avec plusieurs correspondances!
Comment cela s'était terminé ?
1/ Par une unification, intégration et simplification des
techniques, via le protocole IP... qui a finit par permettre
l'essor d'Internet.
2/ Par une complexité accrue de la gestion des données qui
arrivaient en masse... d'où l'origine des solutions ERP que
l'on retrouve au début de notre cycle 1990-2002.
Si l'on regarde bien... bref, si
l'on tire les leçons de ces différentes périodes, on doit
pouvoir mieux situer l'importance de son employeur (audit,
conseil, SSII, ...) dans ces différents cycles par rapport au
client (client de l'informatique). Cela doit permettre de
mieux gérer les moments creux et de mieux se préparer à
rebondir dans la bonne direction.
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