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Introduction
Peter Drucker attribue au management
la vertu de permettre la collaboration efficace des
collaborateurs de savoirs et de talents divers au sein d'une organisation.
Dans notre domaine (l'ingénierie informatique), le challenge
est double :
- en tant que "travailleur du savoir"
(propriétaire de son moyen de production - ses connaissances,
son cerveau -), il s'agit réussir à nous faire travailler de
façon efficace... or un travailleur du savoir ne produit rien
par lui même : il est dépendant des instructions de son
supérieur pour satisfaire aux normes attendues par
l'organisation ([PDrucker99]).
cf. Informaticien
et Cadre ? Qu'est encore
un cadre ?.
- en tant qu'informaticien, il est rare de travailler dans
un domaine "purement informatique", mais plutôt
dans un domaine métier - fonctionnel - qui utilise
l'informatique (dixit cet ingénieur
de 30 ans de métier) : il s'agit donc de savoir nous
faire collaborer avec d'autres travailleurs du savoir,
spécialisés dans d'autres métiers...
Quelles sont donc les caractéristiques de
telles organisations ? Et pourquoi existent-elles ? Simplement
parce que ces métiers du tertiaire ont une valeur ajoutée
plus grande et rapportent plus de fric ??? S'en tenir à cette
réponse basique serait faire la preuve que « vous avez encore beaucoup à apprendre, jeune padawan* »
(*padawan=apprenti Jedi, StarWars)
Caractéristiques de
l'organisation
Structure adaptée à sa mission - [PDrucker99]
-
Elle ne possède pas une structure unique
et absolue : elle peut être centralisée ou décentralisée,
prôner le travail en équipe ou au contraire le
"commandement et contrôle individuel", etc... vous
le vérifiez tous les jours en tant qu'informaticien dans des
sociétés clientes de l'informatique pour des tâches très
diverses (tant tertiaires qu'industrielles ou d'éditeurs de
logiciel ou ...). On y retrouve des répartitions en
départements, en secteurs, en structures matricielles et j'en
passe.
Une hiérarchie (... en théorie!) - [PDrucker99]
-
En revanche, elle possède toujours une
hiérarchie qui permet, à différents niveaux et en
particulier au plus haut, de trouver un patron,
celui qui prend les décisions finales, qui trouve les
"bons" compromis, qui dirige... et qui s'attend à
être obéi.
Et là, en informatique, on est mal barré en France... car
cette technologie barbare avec ses serveurs d'applications,
ses bases de données et ses langages ésotériques ont
effrayé les gens "métiers", les clients de ces
moyens électroniques. Du coup, le plus souvent on se retrouve
avec 2 hiérarchies : une "maîtrise"
d'ouvrage (MOA) du côté du client, et une "maîtrise"
d'œuvre (MOE) du côté des tekos. Bien sûr, ces deux
hiérarchies peuvent "cohabiter" au sein d'une même
société, un de ses départements - métier - étant client
d'un service technique d'un autre département - plus orienté
technique informatique -. Il faut prendre conscience très
tôt de leur existence, les identifier correctement et
toujours rester à l'écoute en priorité de la hiérarchie du
client, même si ce n'est pas la votre, car votre mission vise
d'abord à satisfaire le client.
Transparente et plate -
[PDrucker99]
-
Vous devez comprendre la façon dont
fonctionne la structure de votre organisation... ce qui est
facilité s'il n'y a pas trop de couches de pouvoir (d'où
"plate"), car chaque relais double le bruit et
diminue de moitié le message.
Évidemment, pour un travailleur du savoir,
en particulier technique - donc non lié à un métier
fonctionnel précis -, cette vision n'est pas toujours évidente
à obtenir : les années 1990 ont vu les entreprises vouloir
massivement "se recentrer sur leurs métiers", suite
à une crise et de nombreux audits (cf. Organisations
(informatiques) & Cycles (économiques)) (cela
a culminé avec, entre autres, le Crédit Lyonnais et sa dette
imposante après quelques aventures dans le cinéma
américain...). Il s'agissait à l'époque de donner une
meilleure visibilité aux actionnaires.
Du coup, pas mal de services se sont
vu externalisés, surtout dans le domaine
informatique. Et même si vous travaillez directement pour une
organisation... votre département sera parfois géré comme
une entité externalisée. Cela change la nature de votre
travail, qui devient plus "temporaire" (un projet
précis pour une période déterminée) et votre relation avec
l'organisation (vous êtes moins un "subordonné"
qu'un associé qui peut très bien quitter à tout moment
la-dite organisation; vous avez donc moins besoin que d'autres de
connaître en détail le fonctionnement de l'organisation).
Bien sûr, ce qui précède trouve une image caricaturale dans
le prestataire de service en SSII,
particulièrement lorsqu'il intervient en régie...
Pourquoi l'organisation ? - Pas pour le
"profit"
La première caractéristique évoquait un
bout de la réponse : pour remplir une mission!
Et l'on peut croire qu'il s'agisse juste de s'en mettre plein
les fouilles, de gagner toujours plus de thunes...
Croire cela, comme le pense notre
prestataire désabusé cité en introduction, c'est croire en
la théorie de la maximisation du profit (faire du fric pour
faire... encore plus de fric), et c'est d'autant plus facile
d'y croire que :
1/ le profit est indispensable à toute société - la performance
économique constitue même la fameuse mission
évoquée plus haut, en tout cas pour toute institution
privée. Il s'agit bien là de son objectif rationnel ;
2/ la motivation première du travailleur est souvent perçue
comme étant son appétit pour l'argent, appétit qui
expliquerait ou guiderait sa conduite... le "mobile-profit"...
que l'on retrouve en filigrane dans les réponses des jeunes
ingénieurs en entretien d'embauche - à la question pourquoi
venir chez nous - : en période
de prospérité où ils n'ont
que l'embarras du choix, on sent bien qu'ils viennent là
parce que le salaire est plus élevé que chez le concurrent!
Or ([PDrucker74])
:
1/ le profit n'est pas
l'explication, la cause ou la justification du comportement de
l'entreprise, mais un test de sa
validité, un impératif qui conditionne la vie et
survie, la bonne continuation de sa société.
2/ Ce "mobile-profit"
n'explique rien et ne regarde que chacun d'entre nous
(cf. à ce sujet Négocier
une augmentation de salaire). Les vraies raisons de
tout travailleur, particulièrement des dirigeants de
société ne peuvent se situer dans le seul profit (mais s'ils
ont envi, en plus, de gagner de l'argent, tant mieux pour eux,
cela les regarde). Pour les travailleurs
du savoir, les raisons relèvent plus du défi,
de la formation recueillie au cours de la réalisation de ce
défi, et de la fierté tirée du résultat...
j'espère que n'importe que programmeur informaticien a bien
choisi ce métier pour ces raisons profondes qui relèvent de la
passion. Évidemment, les conditions de réalisation des-dits
programmes ne favorisent pas toujours le plein épanouissement
de ces nobles motifs, comme le souligne Laurent
Bossavit.
Pourquoi l'organisation ? - Pour le client
Pour Peter Drucker, il faut faire quelque
chose de peu évident pour un jeune diplômé, la tête dans
le guidon au sein de sa boite... il faut considérer celle-ci
comme un organe de la société
("société" au sens "société humaine",
pas au sens "entreprise").
Du coup, votre boite faisant partie d'un
tout, d'une société, on peut se demander ce qu'elle y fait,
quelle est son interaction et par extension... ce que l'on
trouve en dehors, à l'extérieur de cette boite ???
La réponse est simplissime : en dehors de
votre entreprise, il y a... des clients! Et plus important
encore, des "non-clients". Il n'y a ainsi qu'une
définition valable de l'objet de l'entreprise privée : créer
le client. ([PDrucker74]).
Le marché ne se crée pas tout seul mais
par les acteurs des entreprises, afin de répondre à des
besoins qui restent potentiels tant l'entreprise ne les a pas
transformés en des demandes effectives. Ce besoin n'est pas
toujours ressenti par le client : tout le monde ne voyait pas
l'utilité d'un ordinateur (compliqué!) chez soi... avant
qu'Internet n'explose et que les constructeurs mettent à
disposition des configurations très bon marché... De là,
personne n'envisageait de visualiser sa future voiture dans 26
coloris différents, jusqu'à ce que d'autres constructeurs
(automobiles ceux-là) ne fournissent des sites où une telle
"pré-visualisation" est possible! Etc...
[Un client et ces process au centre
de la technologie est indispensable pour éviter une crise...
Au passage, signalons la nécessité pour l'organisation de
posséder un vrai SRH - Service des Ressources Humaines, cf. À quoi servent les Ressources Humaines en SSII ?
- qui gère tous les aspects internes de ces ressources afin
que ces dernières se concentrent sur leur mission : trouver
le client.]
Comment faire ? 2 mots :
marketing et innovation.
Le marketing ne concerne pas la vente (ce qui
est déjà passé), mais plutôt ce que le client a envi
d'acheter (ce qui est à venir), à savoir non pas un produit,
mais une "utilité", un avantage que lui apporte le
bien ou le service. Un marketing bien fait tend à rendre superflu
l'effort de vente, son but étant de connaître et de
comprendre le client si bien que le produit ou le service lui
convienne en tous points et qu'il se vende tout seul!
L'innovation n'est pas liée à l'invention
(création de nouveaux produits), mais plutôt à la
création de nouveaux marchés. Elle représente
"l'esprit d'entreprise", sa volonté de
s'améliorer. Elle permet à l'entreprise de fournir des
services meilleurs et moins chers, pour générer des besoins
nouveaux (et donc des clients nouveaux). Cf. Informaticien
et Français ? Dur!
Fonctions d'une entreprise
privée : Afin de créer le client et rester à son
écoute de façon efficace, une entreprise affichera deux
fonctions.
- fonction de productivité : la fonction
même de l'entreprise est de rendre productif le travail de sa
seule véritable ressource : vous. Il s'agit aussi de vous
rendre productif.
- fonction sociale : il ne faut pas oublier
qu'aucune de nos institutions n'existe pour soi et n'est une
fin en soi; elles sont toutes un organe de la société, et
n'existent qu'en fonction d'elle. L'entreprise privée ne se
justifie qu'en étant utile à la société : une SSII,
typiquement, répond à des marchés techniques par des
prestations techniques, mais au delà, répond à un besoin de
société d'encadrement de l'intérim de haut niveau (statut
contesté/contestable), permettant aux autres entreprises de
bénéficier de personnel de haut niveau, souple et
flexible!
Pourquoi l'organisation ? - Heu... et alors ?
Rappelons que ce qui vous permet,
travailleur du savoir spécialisé (ici en informatique) de
travailler efficacement au sein d'une organisation avec
d'autres travailleur, c'est le management. Méconnaître la
nature profonde de l'organisation pour laquelle vous
travaillez, c'est s'exposer à une collaboration de mauvaise
qualité avec celle-ci, à une réponse imparfaite aux besoins
de la-dite organisation, à une méconnaissance du client final et de ses
attentes.
D'où l'utilité des paragraphes qui précèdent.
Et alors ?
Et alors en Informatique, vous risquez de
tomber dans des milieux professionnels qui ne facilitent pas
une bonne appréhension de l'organisation, ce qui peut vous
démotiver ou vous rendre cynique (d'où la citation de ce
prestataire en 2000, en en-tête de cet article)
Prenons 2 exemples typiques :
SSII
: le gros problème en SSII réside dans la qualité de la
relation qui existe entre vous - prestataire de service - et
votre boite : elle n'est pas souvent bonne, du fait d'un conflit
d'intérêts entre vous, votre commercial et une
DRH parfois anémique...
[PBaudry]
insiste sur l'importance - pour un français - de
la relation
qui prime sur la tâche. Les Américains définissent d'abord
le job et trouvent, après une recherche systématique, le
collaborateur qui convient exactement au profil. Les Français
font le choix d'une personnalité avec laquelle ils ont déjà
des liens, et la laissent modeler le job en fonction de sa
personnalité (d'où la Période
d'Essai).
Or, en SSII, tout est - trop souvent - fait pour que la
relation ne soit pas bonne, ce qui entraîne une tâche
effectuée incorrectement : cela ne signifie pas que vous
dérogerez à votre mission technique, mais vous manquerez à
votre tâche principale : comprendre les motivations de votre
entreprise, son marché principal, ses innovations possibles,
bref, tout ce qui dépasse le cadre strict de votre mission de
prestataire.
Ces "tâches principales" peuvent se traduire par
des choses aussi simple que de "laisser traîner son
oreille" chez le client et remonter à votre commercial
tous les besoins potentiels, transmettre une description de
l'organisation du client afin de favoriser la création de
nouvelles missions, insister pour créer une cellule d'étude
sur telle technique dont vous voyez, sur le terrain chez le
client, qu'elle prend de l'importance, etc... Ces
réflexes-là sont naturels si vous avez réfléchi à l'objet
de votre organisation, de votre SSII (qui n'est pas toujours
un loueur de viande à faible valeur ajoutée, mais peut avoir
des dimensions de conseil - cf. SSII & Conseil : réactions !
-, de formation, de forfait, d'éditeur de logiciel, de veille
technologique, d'expertise, etc., etc...)
Sans réflexion, votre boite ne devient plus qu'un
"bulletin de salaire en fin de mois".
Éditeur de logiciel technique : je pense par
exemple à un éditeur d'un serveur d'application, programme
hautement technique. Dans ce type de société, qui n'est pas
"cliente" de l'informatique, mais dont le métier
même est l'informatique, le danger réside dans la
difficulté à identifier les besoins de ses clients, ce qui
est indispensable pour bien comprendre l'objet de son
organisation.
En effet, ses clients immédiats sont d'autres
informaticiens, qui vont mettre en œuvre ce serveur d'application.
Ce ne sont pas les clients finaux du-dits serveur
d'application (même si les deux peuvent appartenir à la
même société). Et tout informaticien sait que les besoins
qu'il juge important (par exemple, que les fichiers de
description de service se déploient tout seul automatiquement
sur un clic de souris) sont très différents des
besoins du client final - non informaticien - (par exemple,
traiter un million de requête par heure en pointe... ah ben
oui, le test de charge !!! On ne l'a pas poussé à ce point
notre serveur, dommage, non ?).
Pour bien innover, ce type de société doit donc anticiper
les besoins des clients de ses clients! Balèze...
Conclusion
L'organisation est le champ d'application
du management, et à ce titre, il méritait que l'on
détaillât ses caractéristiques et son objet. On aura vu
qu'il est facile, pour des ingénieurs en informatique, de
passer à côté de cette réflexion, au risque d'entraîner
cynisme, démotivation, manque d'intérêt.
Un premier pas vers une meilleure relation
avec son entreprise doit consister à replacer le
client à la
source et à la destination de la démarche de la-dite
entreprise. Cela permet de mieux mesurer le "service que
l'on rend effectivement", d'en tirer satisfaction et
fierté.
Les obstacles sont réels, mais au moins
cet article doit pouvoir vous aider à les nommer et les
identifier. À vous de me dire
s'il vous aura permit d'évoluer.
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