Mais
pourquoi y z'ont attaqué ?
La CGT et FO ont dénoncé le
projet d'extension de la CCN Syntec sur 2 points
:
- l'organisation
du temps de travail sur l'année
(l'annualisation, quoi). Cet article premier du
chapitre 3 a bien été étendu par le ministère
le 21 décembre dernier, mais la validité de 2
de ces alinéas est contesté.
- les
dispositions relatives aux horaires de travail
: les articles 3 et 4 du chapitre 2, concernant
la "réalisation de mission"
(sans ou avec autonomie complète). Vous ne
pouvez pas les louper : ce sont les passages en italique bleu barré.
S'ils sont barrés, c'est parce qu'ils n'ont pas
été étendu par l'arrêté
d'extension de l'accord, signé par le
ministère de l'emploi le 21 décembre 1999. A
l'époque, de telles dispositions étaient en
effet illégales : seule le déompte horaire
du temps de travail était autorisé (comme cela
est rappelé au paragraphe "modalité"
de ce même article).
Cependant, la Loi Aubry2 étant en vigueur depuis
février 2000 et les rendant théoriquement
légaux, ces 2 articles peuvent revenir à tout
moment lors d'un passage devant une
sous-commission des Conventions et Accords de la
Commission Nationale de la Négociation
Collective. En attendant, leur validité même
est contesté.
Les 2 paragraphes suivants présentent (en
résumé) les arguments des différentes parties
et les attendus du TGI.
Les conséquences de ce verdict sont ensuite
détaillées.
Organisation
du temps de travail à l'année
Le paragraphe sur l'annualisation permet aux différentes modalités de
contrats d'une "modulation sur l'année
permettant d'adapter la durée du travail aux
variations de la charge de travail".
Ce qui est contesté, c'est le passage précisant
que « les heures effectuées pendant la période
de modulation au delà de la durée hebdomadaire
légale ne sont pas considérées comme des
heures supplémentaires. [...] »
Or, en cas d'annualisation, une circulaire DRT
94-4 du 21 avril 1994 prévoit des contreparties
sous la forme de demi journées ou journées de
repos supplémentaires.
Pour les demanderesses (CGT FO), la seule
diminution de 39 à 35 ne constitue pas une
contrepartie.
Pour la Syntec, non seulement s'en est une, mais
en plus la rémunération est maintenue.
Le TGI décide que l'accord, instituant une
réduction de la durée hebdomadaire du travail
à 35 heures, à une époque où la
durée légale était de 39,
comporte bien une contrepartie.. Il ne dit rien
quant aux sociétés qui imposeraient une telle
modalité aujourd'hui,
alors que la durée est officiellement depuis
février 2000 à 35 heures : contreparties ou non
?
Dispositions
relatives aux horaires de travail (1/2 "réalisation
de mission")
Cela concerne
en particulier tout ceux qui sont en régie (chez
un client).
La CGT et FO soutiennent que cette modalité
prévoit une comptabilisation du temps de travail
en jours (avec 219 jours comme limite maximum
clairement indiquée). Cette comptabilité est,
selon eux, illégale (à l'époque de l'accord et
après Aubry2) !
Pour la Syntec, il s'agit d'un décompte
horaire complété par une limite en jour,
limite dont les 219 jours ne sauraient être
comparés aux 217
jours prévus par la Loi Aubry2 en cas de forfait
annuel.
C'est d'ailleurs, en substance, la conclusion du
TGI...
Si cet article est étendu,
les salarié bénéficieront d'un horaire
hebdomadaire de 35 heures, mais pourront se voir
proposer une convention de forfait horaire
hebdomadaire de 38h30 si leur rémunération
forfaitaire est au moins égale à 115% du salaire minimum conventionnel. Cette modalité devra faire l'objet
d'un avenant, signé, au contrat de travail. En
cas de refus de la part du salarié, il y a
rupture du contrat de travail du fait de
l'employeur. Au delà de 38 h 30, les heures
supplémentaires sont appréciées par tranche de
3 h 30 (Tranche Exceptionnelle d'Activité), et
donnent lieu à des demi journées de
récupération. Il n'y a ni modulation du temps
de travail, ni calcul forfaitaire du temps de
travail en jours. Dans cette
modalité, le nombre maximum de 219 jours est une
limite supplémentaire.
Dispositions relatives aux
horaires de travail (2/2 "réalisation
de mission avec autonomie complète")
Cela concerne
en particulier tout les cadres de "haut
niveau", consultants ou commerciaux.
La CGT et FO dénonce un article illégal au
moment de sa signature (et qui n'a donc pas été
étendu), mais également illégal aujourd'hui
car :
- le forfait prévoit 219 jours maxi au lieu des 217 jours prévus par la Loi Aubry2.
- l'article ne prévoit pas les modalités de
décompte des journées et demi-journées de
travail et de prise de repos, ni celles relatives
au suivi, à l'organisation du temps de travail,
et à la charge de travail alors que la Loi l'y
oblige.
La Syntec fait remarquer, concernant le second
point, que ces clauses sont présentes dansles
chapitres 7 et 5 de l'accord... ce qui est retenu
par le TGI
Le TGI ne fait que modifier le nombre
de jours du forfait annuel à sa limite légale :
217. (d'où les "quelques
jours de trop" dans le titre de cet article)
Bref, et alors ?
A première vue, pas grand
chose : les 2 articles non-étendus pour
l'instant se voient donner une "légitimité" par le TGI de Paris, ce qui
devrait peser lors du prochain passage devant la sous-commission
des Conventions et Accords de la Commission
Nationale de la Négociation Collective, ce qui
aurait dû intervenir le 16 juin dernier...
En fait, la vraie polémique vient
d'un courrier daté du 25 avril 2000 adressé à
Martine Aubry, dans lequel SYNTEC, CICF, CGC et
CFDT écrivent :
« Les dispositions
concernées portant sur certains cadres soumis à
un décompte du temps de travail
en jours, ceux affectés à la
modalité de réalisation de missions décrite à
l’article 3 du chapitre 2,
nous tenons à apporter la lecture unanime
suivante :
1- Ces cadres, soumis à un décompte en jours,
ne peuvent légalement dépasser un nombre annuel
de jours travaillés de 217. L’accord de
branche négocié avant la promulgation de la loi
est soumis à ce maximum. Toutes les parties
signataires sont disposées à afficher et à
appliquer ce plafond dès extension, et aussi à
le renforcer conventionnellement par voie
d’avenant.
[...] »
Or, si l'on relit l'argumentation de la Syntec
devant le TGI, on trouve, pour ce même article 3
du chapitre 2, que cette modalité :
« ne comporte pas une convention de
forfait en jours, mais une convention de forfait
horaire sur une base
hebdomadaire de 38 h 30 avec un maximum de 219
jours travaillés dans l'année qu'il ne s'agit
donc pas d'une modulation relevant de l'article
L.212-2-1 du Code du travail, mais d'un système
de réduction du temps de travail amélioré avec
forfaitisation des heures supplémentaires
éventuelles »...
D'où un double langage
qui n'a pas manqué de choquer certain :
décompte en jour ou décompte horaire ?Bref, et alors (bis) ?
Si vous êtes en régie et
que vous continuez à envoyer chaque mois
votre CRAM (Compte Rendu d'Activité Mensuel), ne vous bilez pas, cela ne risque pas de
changer.
Ce qui ressort de tout cela, c'est que tout
est prévu pour que, discrètement, votre travail
soit comptabilisé d'une façon ou d'une autre en
jour.
Si l'on relis l'article sur les 35 Heures et les cadres, on se rappellera d'ailleurs que
ce mode de comptabilité pourrait même arranger
beaucoup de monde.. : des horaires
"libres", cela peut s'avérer
confortable. Mais cela peut bien entendu laisser
la porte ouverte à toute sorte d'abus.
Bref, à surveiller :
- vos accords d'entreprise sur les 35 heures,
- la prochaine extension de l'accord de branche
Syntec sur les 35 heures, avec en particulier ces
fameux 2 articles (3 et 4 du chapitre 2). S'ils
passent... les 35 heures représenteront
simplement quelques jours de RTT
supplémentaires, mais rien de bien concret
concernant vos horaires journalier et/ou
hebdomadaires.
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